L’hôtel de Chenizot

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L’hôtel de Chenizot : l’éblouissant portail de style rocaille

Le chancelier Etienne II d’Aligre

Ce vaste hôtel particulier date du lotissement de l’ile Saint-Louis autour des années 1640. En 1641, il appartient à Geneviève L’Huillier, veuve de Michel Moreau, ancien prévôt des marchands.  Celle-ci l’apporte à son second époux, Etienne II d’Aligre (1592-1677). Grand serviteur de l’Etat, il participe au conseil royal des finances en 1661 avant de devenir garde des sceaux en 1672, puis chancelier de France en 1674.

L’hôtel de Chenizot : le premier bâtiment donnant sur la rue

Un hôtel remanié dans le style rocaille

En 1719, la demeure est acquise par Jean-François Guyot de Chenizot, receveur général des finances à Rouen. Chenizot confie à l’architecte Pierre Vigné de Vigny (1690-1772) le remaniement complet de l’hôtel. Le bâtiment donnant sur la rue est alors habillée d’un magnifique portail de style rocaille doté de bossages vermiculés. Très mouvementé, le balcon repose sur des consoles en forme de chimères sculptées. Les grandes chimères du balcon répondent aux chimères plus petites sculptées en bois dans l’imposte de la porte cochère. A la clef du portail, un mascaron représente une tête de faune dans un cartouche. Au-dessus du portail, un important décor sculpté anime la travée centrale : pilastres encadrant la baie du premier étage, fronton triangulaire (décoré de coquilles, vases, plumes, etc) couronnant le 1er étage et reposant sur d’élégantes consoles, décor de vases au niveau du second étage.

L’hôtel de Chenizot : le logis est situé en fond de cour

Un jardin qui se prolongeait jusqu’au quai d’Orléans

Passé le porche, on débouche sur une cour pavée rectangulaire : le logis de l’hôtel est situé au fond, bordé d’ailes en retour. Sa façade présente un important décor rocaille animant la travée centrale. il a malheureusement été surélevé de deux niveaux ultérieurement. A l’origine, le jardin situé à l’arrière du logis se prolongeait jusqu’au quai d’Orléans. Il a été remplacé par une seconde cour parasitée par des bâtiments à usage artisanal (une galerie d’art occupe un ancien atelier). A l’intérieur de l’hôtel, le départ du grand escalier est orné d’une cinquième chimère, décor attribué à Nicolas Viennot.

L’hôtel de Chenizot : le revers du premier bâtiment donnant sur la rue

Thérèsa Cabarrus, l’intrépide Madame Tallien

A la mort de Chenizot, la demeure passe à sa veuve puis à son fils. Il est acquis en 1776 par un magistrat, M. Devin. Son petit-fils, Jean-Jacques Devin de Fontenay, est conseiller au Parlement de Paris. Il épouse en 1788 Thérèsa Cabarrus (1773-1835), une aristocrate d’origine franco-espagnole. Elle est alors âgée de 14 ans et demi. Illustration de son désir d’ascension sociale, Devin de Fontenay achète en 1788 un marquisat, payé au prix fort de 400.000 livres, pour accéder à la noblesse.

Portrait de Mme Tallien par le baron Gérard, vers 1804

Portrait de Mme Tallien par le baron Gérard, vers 1804

Notre-Dame de Thermidor

Thérèsa Devin de Fontenay tient dans cet hôtel un cercle important favorable aux idées des Lumières et de la Révolution. Réfugiée à Bordeaux en 1793, elle se lie avec Jean-Lambert Tallien, député de la Convention siégeant sur les bancs de la Montagne. Elle finit par devenir sa compagne et réussit à faire échapper de nombreux bordelais à la guillotine. D’où son surnom de « Notre-Dame de Thermidor ». En 1794, elle épouse Tallien. Sous le Directoire, Mme Tallien devient la maîtresse de l’homme politique Paul Barras, l’un des trois directeurs à l’origine du coup d’état du 18 Fructidor an V (4 septembre 1797). Elle reçoit somptueusement dans la propriété de ce dernier, le château de Grosbois. En 1798, Mme Tallien rencontre le richissime fournisseur aux armées, Gabriel-Julien Ouvrard. Celui-ci lui offre en 1799 une ancienne folie située dans le faubourg Saint-Germain, plus connue sous le nom d’hôtel de Chanaleilles. Sous l’Empire, la salonnière se remarie en 1808 à François Joseph de Riquet de Caraman, prince de Chimay.

L’hôtel de Chenizot : l’aile à droite dans la cour

La résidence de l’archevêque de Paris

L’hôtel de Chenizot devient en 1815 la propriété d’un marchand de vin. En 1840, l’Etat le loue et en fait la résidence de l’archevêque de Paris, Monseigneur Affre. En 1849, l’archevêché migre à l’hôtel du Châtelet dans le faubourg Saint-Germain. L’hôtel est alors transformé en caserne de gendarmerie, ce qui entraine sa mutilation. Depuis, l’hôtel a été séparé en habitations. La première cour est visible à travers une grille.

L’hôtel de Chenizot : la façade du logis donnant sur la 2e cour a été parasitée par des bâtiments bas

L’hôtel de Chenizot est commenté au cours de la visite guidée de l’ile Saint-Louis.

Pour l’architecte Pierre Vigné de Vigny, voir également la cour du Dragon, la maison La Barre de Caroy.

Sources :
Gallet (Michel), Les architectes parisiens du XVIIIe siècle, Paris, Mengès, 1995.
Hillairet (Jacques), Dictionnaire historique des rues de Paris, Paris, Editions de Minuit, Réédition de 1997.

Adresse : 51 rue Saint-Louis en l’île

Métro : Pont-Marie

Arrondissement : 4e

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