L’hôtel
de Châlons-Luxembourg
Un extraordinaire portail
Le portail de cet hôtel est l’un des plus éblouissants construits à Paris au XVIIe siècle. Conçu en forme d’arc de triomphe, il signale depuis la rue l’importance du propriétaire. Encadré de pilastres ioniques jumelés, le portail est surmonté d’un arc en plein cintre dont les voussures sont garnies de feuillages. Son tympan est entièrement habillé par une grande coquille et un mufle de lion. Tenant la coquille par ses pattes, le lion semble tenir dans sa gueule le cartouche noir où figure le nom de l’hôtel.
Les commanditaires de l’hôtel
Cette demeure est construit vers 1625 pour Guillaume Perrochel, auditeur à la Chambre des Comptes du roi et pour son épouse Françoise Buisson. Les lucarnes de l’hôtel portent encore les initiales P et B pour Perrochel et Buisson.
Un nom à l’origine mystérieuse
Pourtant les noms « hôtel de Chalon 1625 » et « hôtel de Luxembourg 1659 » sont gravés sur le portail. Il pourrait s’agir de la réunion de deux noms de famille : les Chalons et les Luxembourg. L’origine de la famille Chalons est peu connue : il s’agit probablement des Chalons originaires d’Espagne. Etablis à Rouen, ils comptèrent plusieurs membres à la Cour des Comptes de Normandie. Le nom « Luxembourg » proviendrait de Marie Amelot de Bisseul, épouse séparée de Charles Béon de Luxembourg. En effet, la famille Amelot de Bisseul est propriétaire de l’hôtel de 1658 à 1762. En 1779, la demeure est vendue à Claude Polissard, marchand de vin du roi.
Des façades d’une grande fantaisie
A cause de l’étroitesse de la parcelle, l’architecte (dont le nom est inconnu) décide de construire un logis double en profondeur. Les deux logis accolés ont d’ailleurs de hauts toits indépendants animés de lucarnes et d’œils de bœuf. L’emploi de la brique et de la pierre est tardif car il est déjà passé de mode à Paris dans les années 1620. Sur la cour, la façade présente beaucoup de fantaisie : entre les cinq travées, des tables de pierre animent la maçonnerie de brique. Des mascarons décorent la clef de chaque baie. Des cartouches et des drapés sont sculptés sous la corniche. Sur le jardin, on retrouve des éléments décoratifs similaires. De ce côté, la façade comporte seulement quatre travées car deux étroits pavillons ont été ajoutés aux extrémités. A l’intérieur est conservé un bel escalier datant de la fin du règne de Louis XIV. Une statue représentant « La Naissance de Vénus » occupe une niche dans le vestibule. Les combles d’ardoise sont couronnés par des épis de faitage en plomb. Pittoresques et élégants, ils ont la forme de vases. Ce sont parmi les derniers conservés à Paris.
Des résidents célèbres
Le caricaturiste Charles Huart habite l’hôtel au début du XXe siècle. En 1914, le rez-de-chaussée est loué par le poète italien Gabriel d’Annunzio. Vendu à l’architecte et milliardaire Jean Walter, l’hôtel est donné à la Ville de Paris en 1948. Occupée un temps par la Commission du Vieux Paris, cette demeure exceptionnelle est dans un état de conservation très préoccupant. De considérables travaux de sauvetage sont nécessaires pour le remettre en état. Mis en vente par la Ville de Paris, l’hôtel ne trouve pas acquéreur. En 2015, la Mairie de Paris décide de louer l’hôtel au Mémorial de la Shoah (situé dans la même rue) dans le cadre d’un bail emphytéotique de 85 ans.
Pour l’architecte Jean Walter, voir également la Petite Alsace, l’école pratique de la Faculté de Médecine Paris-Descartes, les immeubles Walter, la cité Paris-Jardins à Draveil.
Sources :
Chadych (Danielle), Le Marais, évolution d’un paysage urbain, Paris, Parigramme, 2010.
Jamme (Pierre) et Dupont-Danican (Jean-François), Gentilhommes et Gentilhommières en pays de Caux, Paris, Editions de La Morande, 1996.
Guide du patrimoine Paris, sous la direction de Jean-Marie Pérouse de Montclos, Paris, Hachette, 1994.
Adresse : 26 rue Geoffroy l’Asnier
Métro : Saint-Paul
Arrondissement : 4e
Téléphone :