La Chancellerie d’Orléans
ou hôtel d’Argenson (démoli)
La maîtresse du duc d’Orléans
Philippe d’Orléans (1674-1723), duc d’Orléans et futur Régent, réside au Palais-Royal. Entre 1704 et 1705, il fait construire juste à côté un hôtel particulier par l’architecte Germain Boffrand. Cet hôtel est destiné à loger sa maîtresse, Marie-Louise Lebel de la Boissière de Séry, comtesse d’Argenton. L’hôtel est situé selon la tradition entre cour et jardin. Le jardin communique avec celui du Palais-Royal. Ils seront séparés en 1784 lors de la création de la rue de Valois. A l’intérieur, le grand salon donnant sur le jardin est embelli entre 1706 et 1709 par un plafond peint par Antoine Coypel sur le thème du Triomphe de l’Amour sur les dieux.
La chancellerie de la famille d’Orléans
En 1711, l’hôtel est vendu à Charlotte de Bautru, veuve de Jean-Baptiste de Rohan. En 1720, le duc d’Orléans le rachète et son fils Louis d’Orléans en hérite à sa mort. De 1725 à 1752, l’hôtel sert de chancellerie aux Orléans. Le chancelier et surintendant de la famille, Marc-Pierre de Voyer, comte d’Argenson, en a l’usufruit et l’habite.
Un hôtel remanié par l’architecte Charles de Wailly
De 1752 à 1784, son fils, Marc-René de Voyer de Paulmy (1722-1782), duc d’Argenson, en est le propriétaire. C’est un grand protecteur des arts et des artistes. Il souhaite faire de son hôtel un modèle du genre en remettant au goût de l’époque toute la décoration intérieure et extérieure. Entre 1762 et 1770, le duc d’Argenson charge son ami, l’architecte Charles de Wailly, de superviser tous les travaux. Les Argenson vont y engloutir toute leur fortune. De cette période datent des plafonds peints par Louis-Jacques Durameau, et Gabriel Briard, des boiseries, et des décors sculptés d’Augustin Pajou. En 1772, Jean-Jacques Lagrenée exécute un nouveau plafond sur le thème de Hébé versant le nectar à Jupiter.
Un hôtel particulier d’un style nouveau
Charles de Wailly (1730-1798) opère pendant cette même période un rhabillage complet des façades de l’hôtel et du bâtiment sur rue. L’architecte va y exprimer son goût pour le style néoclassique (ou style à l’antique) : dépourvues d’ornementations, les façades sont simplement animées par des refends. Chaque façade est centrée sur un portique reposant sur des colonnes ioniques (côté jardin) ou doriques (côté cour), vocabulaire emprunté à l’architecture antique. L’hôtel d’Argenson est alors considéré comme l’un des plus beaux hôtels particuliers parisiens. Suscitant une vive curiosité, il devient un objet de visite pour l’aristocratie parisienne comme pour les étrangers.
L’acquisition par la Banque de France
Après la mort du duc d’Argenson en 1782, ses héritiers, dépassés par l’ampleur des travaux engagés, sont contraints de revendre l’hôtel aux duc d’Orléans. Au XIXe siècle, l’hôtel est surélevé d’un étage; il est utilisé à usage commercial. En 1914, sa dernière propriétaire fait classer l’hôtel. Mais la Banque de France, dont le siège se situe à l’hôtel de la Vrillière voisin, souhaite s’agrandir : l’hôtel de la Chancellerie d’Orléans est déclassé en 1923. La Banque de France s’engage alors à reconstruire l’hôtel à proximité. Pourtant, l’édifice est démoli au mépris de toutes les lois. De nouveaux bâtiments sont construits à la place. Cette destruction provoque alors un énorme scandale.
Des décors intérieurs remontés à l’hôtel de Rohan
Fort heureusement, la conservation des décors intérieurs avait été assurée avant la démolition de l’édifice. Les éléments décoratifs, parmi les plus beaux décors de la fin du XVIIIe siècle, sont alors stockés à Asnières par la Banque de France avec la promesse de les remonter ultérieurement dans un autre lieu. La promesse se fait longtemps attendre puisqu’en 2011 seulement la Banque de France accepte de céder les décors au ministère de le Culture. Restauré grâce au financement du World Monument Fund Europe, cet ensemble unique de boiseries et panneaux peints a été remonté en 2022 dans les salons du rez-de-chaussée de l’hôtel de Rohan, faisant partie des Archives nationales. Courant 2023, les visiteurs pourront en principe découvrir les quatre salons, à raison d’une ouverture à la visite (sur réservation) deux samedis par mois.
Pour l’architecte Germain Boffrand, voir également l’hôtel Le Brun, l’hôtel de Soubise, l’hôtel de Seignelay, l’hôtel Amelot de Gournay, l’hôtel de Beauharnais, l’hôtel de Villars, l’hôpital de la Pitié-Salpétrière, les trésors cachés du Petit Luxembourg, l’église Saint-Merri.
Pour l’architecte Charles de Wailly, voir également le théâtre de l’Odéon, la basilique Saint-Denis, l’église Saint-Sulpice.
Sources :
Gallet (Michel), Les architectes parisiens du XVIIIe siècle, Paris, Mengès, 1995.
Godoÿ (Philippe), Guide du promeneur 1er arrondissement, Paris , Parigramme, 1999.
La tribune des Arts
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