La villa Montmorency
La célèbre comtesse de Boufflers
Située dans les faubourgs de la ville, la propriété a pour cadre le village d’Auteuil. Elle appartient au XVIIe siècle à la famille du célèbre chancelier Etienne d’Aligre. En 1773, la comtesse de Boufflers (1725-1800), née Marie-Charlotte de Campet de Saujon, en fait l’acquisition. Maîtresse de Louis-François de Bourbon, prince de Conti, elle conseille ce prince éclairé, en lutte contre l’absolutisme. Elle tient un salon très couru dans un petit hôtel particulier situé dans l’enclos du Temple, dont le prince de Conti est le Grand Prieur. Madame du Deffand, animant un autre salon tout aussi brillant, la surnomme « l’idole » tant elle est adulée et admirée pour son intelligence et sa beauté. A Auteuil, sa propriété comprend un château (démoli depuis) et un superbe parc de 10 hectares dessiné à l’anglaise. Le parc est alors peuplé de fabriques et considéré comme l’un des plus beaux parcs de Paris. Après la mort de Conti en 1776, la comtesse de Boufflers se retire dans son château d’Auteuil. Arrêtée pendant la Terreur, elle est acquittée et échappe de peu à la guillotine. Passablement ruinée, elle loue sa propriété au prince de Talleyrand (voir l’hôtel de Saint-Florentin) pendant le Directoire.
La naissance de la villa Montmorency
En 1822, la duchesse de Montmorency achète le domaine. En 1852, les héritiers Montmorency le vendent à Emile Pereire (1800-1875). Homme d’affaire et grand investisseur immobilier sous le Second Empire, Pereire fait lotir le terrain qu’il baptise « villa Montmorency », du nom très aristocratique des précédents propriétaires; il le destine à une riche clientèle. Pereire fait également passer une voie de chemin de fer en bordure du parc et fait construire la gare d’Auteuil. Le mot« villa » est né à Paris vers les années 1820 et consiste en un ensemble de maisons dispersées dans un grand jardin privatif aménagé à l’anglaise. L’architecte Théodore Charpentier (1897-1967) dessine cinq allées sinueuses, pompeusement nommées « avenues » : avenue de Montmorency, avenue du Square, avenue de Boufflers, avenue des Sycomores, avenue des Tilleul, avenue des Peupliers. Les maisons de style pittoresque sont le plus souvent inspirées de l’architecture des villas balnéaires de Deauville ou d’Arcachon comme c’est la mode à cette époque.
Un refuge prisé par les artistes
Dès le début du XXe siècle, la villa est prisée par des artistes connus. L’écrivain André Gide fait construire une maison moderne (38 allée des Sycomores) en 1904-1907 par l’architecte Louis Bonnier. Le philosophe Henri Bergson (1859-1941) habite au n°32 avenue des Tilleuls. La tragédienne Sarah Bernhardt et l’architecte Joseph Bassompierre y résident.
La thébaïde des grandes fortunes
Aujourd’hui, la villa Montmorency est certainement l’enclave la plus huppée et la plus privative de Paris. N’espérez même pas y pénétrer, sauf si vous y êtes invités bien sûr, car il faut montrer patte blanche pour y entrer, c’est-à-dire être sur la liste des visiteurs prévus. Sur six hectares, la villa compte 114 propriétaires. Parmi les grands capitaines d’industrie, financiers et patron de media, citons Vincent Bolloré (Vivendi), son fils Yannick Bolloré (Havas), Corinne Bouygues, Alain Afflelou, Dominique Desseigne (groupe Lucien Barrière), Georges Tranchant (groupe Tranchant), Jean-François Roverato (groupe Eiffage), Jacques d’Estais (BNP-Paribas), Jean-Paul Baudecrou (NRJ), Grégoire Chertokk (Rothschild & Cie), Fabrice Pierlot (Coyote), Maxime Ayach (Acadomia).
Parmi les « héritiers », on peut citer Thierry Dassault, Vladimir Taittinger, le comte Jean de Rohan-Chabot ou encore Christine de Vaureix (née Vuitton). Enfin, le show-bizz n’est pas en reste avec Mylène Farmer, Sylvie Vartan, Gilles Jacob, le producteur Alain Goldman, le producteur Tarak Ben Ammar. D’autres y ont vécu mais s’en sont allés : Carole Bouquet, Rika Zaraï. Xavier Niel y a investi mais n’habite pas là. Quant au prix d’acquisition d’une villa, comptez facilement 10 millions d’euros. Tenté par la quiétude du lieu, le footballeur Zlatan Ibrahimovic aurait même renoncé à s’y installer car il trouvait le prix de la villa excessif… Radin Ibrahimovic ?
Pour l’architecte Théodore Charpentier, voir également le hameau Boileau, le village d’Orléans, l’hôtel Dosne-Thiers, la galerie de la Madeleine, l’Opéra Comique, le théâtre des Bouffes-Parisiens, le hameau de Boulainvilliers.
Pour l’architecte Louis Bonnier, voir également le groupe scolaire rue Sextius Michel, la piscine de la Butte-aux-Cailles.
Sources :
Crosnier (Marie-Laure), Guide du promeneur 16e arrondissement, Paris, Parigramme, 1995.
Vanity Fair
Adresse : 12 rue Poussin
Métro : Michel-Ange Auteuil
Arrondissement : 16e
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