L’hôtel de Villette
Plusieurs propriétaires successifs
La construction de cet hôtel est assez longue. En 1642, le gros œuvre est achevé quand le propriétaire, Simon Plastrier de La Croix, maître d’hôtel du roi, décède. Sa veuve, Madeleine Péan, en achève l’édification en 1661. Leur fille et leur gendre, Nicolas et Elizabeth-Marguerite de Bragelongne, y habitent ensuite. Leurs héritiers vendent la maison en 1764 à la veuve du marquis de Gramont. En 1766, elle en cède l’usufruit à Charles-Michel, marquis de Villette, maréchal-général des logis de la cavalerie.
Le singulier marquis de Villette
Charles-Michel de Villette (1736-1796) a connu une vie mouvementée. D’abord avocat du roi au Châtelet, il embrasse ensuite la carrière des armes et devient en 1759 1er aide de camp du prince de Condé. A partir de 1765, Villette habite Paris et mène une vie très libre : s’affranchissant des conventions, il affiche ses amours masculines et s’offre en spectacle avec une comédienne célèbre Melle Raucourt, lesbienne assumée.
La rencontre avec Voltaire
La mère du marquis, Thérèse-Charlotte Cordier de Launay, lui présente Voltaire, auquel Charles-Michel s’attache, épousant au passage les idées philosophiques des Lumières. Se piquant de poésie et de littérature, Villette est pourtant raillé par les beaux esprits pour son manque de talent. En 1777, Voltaire fait épouser dans la chapelle de son château de Ferney Reine-Philiberte de Varicourt, fille d’un officier sans fortune, à Charles-Michel de Villette, publiquement critiqué pour ses amours masculines.
La dernière demeure du philosophe
En février 1778, Voltaire quitte Ferney pour s’installer à l’hôtel de Villette, invité par ses amis. Reconnu par la population, l’écrivain reçoit un accueil triomphal. Aristocrates comme gens du peuple défilent dans l’hôtel pour lui rendre visite. Agé et malade, Voltaire y décède le 30 mai 1778, âgé de 84 ans.
Un aristocrate rallié à la Révolution
Sous la Révolution, Villette embrasse les idées nouvelles et n’hésite pas à brûler ses lettres de noblesse, se faisant désormais appeler Charles Villette. En 1792, il est élu député de l’Oise à la Convention et ose critiquer avec courage la tyrannie de la Commune. Il meurt de sa belle mort le 9 juillet 1793. Le marquis de Villette fit également débaptiser le quai des Théatins (voir le couvent des Théatins) pendant la période révolutionnaire pour le renommer quai Voltaire en l’honneur du grand philosophe. Passé aux Montmorency-Laval, l’hôtel de Villette est vendu en 1824 par ses héritiers à Athanase Barbier, chirurgien en chef de l’hôpital du Val-de-Grâce. L’homme de lettres Arsène Houssaye y loue un appartement en 1843. Le préfet de la Seine, Ferdinand Duval, y meurt en 1896.
Des décors du XVIIIe siècle
Extérieurement, l’hôtel a beaucoup souffert et a perdu de son caractère, ayant notamment été surélevé. La porte cochère située rue de Beaune conserve toutefois son décor néo-classique de bossages, de sphinx, de griffons et de guirlandes du début du XIXe siècle. A l’intérieur, l’hôtel de Villette conserve d’intéressants décors : un grand salon à pilastres et demi-colonnes ioniques, deux petits cabinets et un magnifique boudoir revêtu de lambris. On cite souvent l’architecte Charles de Wailly et le sculpteur Guillaume Coustou pour la décoration intérieure. Ces pièces sont privées et ne se visitent pas.
Sources :
Leborgne (Dominique), Saint-Germain-des-Prés et son faubourg, Paris, Parigramme, 2005.
Le faubourg Saint-Germain, collection « Paris et ses quartiers », Paris, Editions Henri Veyrier, 1987.
Adresse : 27 Quai Voltaire
Métro : Rue du Bac
Arrondissement : 7e
Téléphone :