L’hôtel de Vaudreuil
Cet hôtel est bâti avant 1780 pour le compte de Jean-Baptiste Gaillard de Beaumanoir (1704-1781), fils du fermier-général Jean Gaillard de Saint-Germain. Cet ancien militaire fait également édifier l’hôtel Gaillard de Beaumanoir situé au n°9 rue de la Chaise, auquel il a laissé son nom. La demeure est acquise en 1784 par Joseph-Hyacinthe-François de Paule de Rigaud, comte de Vaudreuil, grand fauconnier du roi, qui va laisser son nom à l’hôtel. Ami du comte d’Artois (frère de Louis XVI), il fait appel à son architecte, Alexandre-Louis Etable de Labrière, pour remanier l’hôtel. Disposant de revenus considérables grâce à sa mère, fille d’un planteur de Saint-Domingue, Vaudreuil est l’ami des artistes (il héberge un temps le poète Chamfort). Il collectionne également les toiles de l’école flamande et hollandaise ce qui le mènera à la ruine. Il cédera d’ailleurs sa collection lors de plusieurs ventes en 1784, 1787 et 1796.
Vaudreuil se sépare également de son hôtel en 1788. La demeure est acquise par la veuve de Jean-Frédéric Phélypeaux de Maurepas, ancien ministre de Louis XV. Elle échoit fin 1793 à sa nièce, Louise-Félicité de Brehan-Pléno, puis en 1796 aux héritiers de celle-ci, les d’Aiguillon et les Chabrillan. En 1803, les Chabrillan se sépare de l’hôtel au profit d’Elisa Bonaparte (1777-1820), sœur de Bonaparte, mariée à Félix Bacciochi. Celle-ci fait moderniser la demeure par l’architecte Blénaud et ajouter les bâtiments sur rue, dans le style néoclassique. Elle y tient un salon littéraire où l’on croise Fontanes, Boufflers, Arnault, Bouilly, Volney, l’abbé Morellet, La Harpe, Roederer, Chateaubriand, Laplace, etc. En 1805, Elisa Bonaparte suit son mari, devenu prince de Lucques et Piombino, en Toscane. Son frère, devenu l’Empereur Napoléon 1er, utilise alors l’hôtel de Vaudreuil pour recevoir des hôtes de marque : le grand-duc de Wurzbourg puis le duc d’Arenberg.
En 1809, l’hôtel est donné au beau-frère de Pauline Bonaparte, François-Dominique Borghèse, prince Aldobrandini, et son épouse, Adèle-Marie-Françoise de La Rochefoucauld. Les salons de l’hôtel deviennent alors le cadre de réceptions somptueuses. A la mort du prince Aldobrandini en 1839, l’hôtel est morcelé : le n°5 est acquis par le comte de Sainte-Suzanne et le n°7 par le duc d’Uzès. Ce dernier réunit l’hôtel en 1857. A sa mort en 1878, l’hôtel se transmet à sa fille, Mathilde-Renée. Loué à une congrégation religieuse puis transformé en clinique durant la guerre de 1914-1918, la demeure est malmenée et perd une bonne partie de son décor intérieur, à l’exception d’un salon Louis XV habillé de très belles boiseries et de trumeaux, ainsi qu’un boudoir Louis XVI.
Menacé de destruction en 1966, l’hôtel a été sauvé grâce à des associations de défense du patrimoine. Mais il a été profondément dénaturé extérieurement. Ainsi la façade sur cour a perdu ses grandes baies en plein cintre au profit de baies rectangulaires. Pire, des bâtiments modernes franchement très discutables ont été bâtis sur les parcelles voisines : ils écrasent littéralement la vénérable demeure. Plus longue, la façade sur le jardin donne aujourd’hui sur le square Roger-Stéphane situé au fond de l’impasse Récamier. L’hôtel de Vaudreuil est aujourd’hui séparé en appartements.
Pour l’architecte Alexandre-Louis Etable de Labrière, voir également l’hôtel Gaillard de Beaumanoir.
Sources :
Gallet (Michel), Les architectes parisiens du XVIIIe siècle, Paris, Mengès, 1995.
Le faubourg Saint-Germain, collection « Paris et ses quartiers », Paris, édition Henri Veyrier, 1987.
Adresse : 5-7 rue de la Chaise
Métro : Sèvres-Babylone
Arrondissement : 7e
Téléphone :