Résidence
de l’ambassadeur du Canada
L’hôtel de Rigny

La comtesse de Rigny

A cet emplacement s’élevaient les écuries du comte d’Artois (frère de Louis XVI) selon les plans de François-Joseph Bélanger. En 1860, le marquis Auguste de Talhouet-Roy rachète les écuries. Après leur démolition, le terrain est divisé en quatre lots donnant sur la rue du faubourg Saint-Honoré. Le marquis se réserve l’un des lots pour faire construire l’hôtel de Talhouet-Roy. Un autre lot est acquis par Narcisse Defontaine (1803-1875), veuve du comte de Rigny, qui tient sa fortune de son premier époux, l’homme d’affaire belge Daniel Honnorez. La comtesse de Rigny y fait édifier un bel hôtel particulier entre cour et jardin, qu’elle va habiter de 1867 à sa mort en 1875.

Une demeure inspirée du classicisme français

Si le nom de l’architecte n’est pas précisément identifié, l’édifice se présente comme une imitation très réussie. Il respecte les canons de l’architecture classique du XVIIe siècle et en incarne toute la sobriété. Ses façades sont rythmées de grandes fenêtres rectangulaires sommées de mascarons d’hommes ou de femmes ; elles sont encadrées de chainages de pierres en harpe en légère saillie. Côté cour, le logis de six travées est flanqué de deux petites ailes perpendiculaires. Celle de gauche a été prolongée par un pavillon servant de hall d’entrée. Côté jardin, le logis est plus ample et occupe toute la largeur de la façade.

Jeanne Lebaudy, une richissime héritière

Habité par la suite par les filles de la comtesse de Rigny, la marquise de Talhouët-Roy puis la marquise de Juigné, l’hôtel particulier est vendu en 1894 à Jeanne Lebaudy (1865-1943), épouse du comte Edmond de Fels (1858-1951), diplomate d’origine suédoise. Appartenant à une véritable dynastie sucrière, la famille Lebaudy originaire de Normandie, Jeanne Lebaudy va mettre sa fortune au service de l’aménagement intérieur de l’hôtel, qui va être sublimé par ses décors. L’architecte choisi selon toute vraisemblance doit être le bien connu Ernest Sanson (1836-1918), architecte fétiche de l’aristocratie à la Belle Epoque. En effet, les travaux vont durer de 1895 à 1905, alors que Sanson est chargé de reconstruire à la même époque le château de Voisins (Yvelines) pour le couple Fels-Lebaudy. Pour cette grandiose demeure de campagne, Sanson sera d’ailleurs remplacé dès 1903 par son élève, René Sergent.

Des décors à la gloire du XVIIIe siècle français

Un nouveau vestibule et un somptueux escalier d’honneur d’inspiration Louis XV sont aménagés. Incarnant toute la grâce du style rocaille, le grand salon est habillé d’éblouissantes boiseries blanc et or surmontées d’une frise de stucs (arabesques de feuillages, guirlandes de fleurs, instruments de musique, carquois, oiseaux exotiques). Quatre dessus de porte d’après Carle Van Loo illustrent la peinture, la sculpture, la musique et l’architecture. De véritables panneaux anciens provenant de l’hôtel particulier (situé rue de Turenne) ayant appartenu à un grand commis de l’Etat, Jacques-André Dupille (1680-1740), sont intégrés à l’ensemble. Plusieurs autres pièces de réception mélangent éléments de boiseries anciennes rapportés et copies imitant superbement les arts décoratifs du XVIIIe siècle : un petit salon, la grande salle à manger (et son merveilleux décor néoclassique imité de Boullée), la petite salle à manger.

La résidence de l’ambassadeur du Canada

Idéalement situé dans le faubourg Saint-Honoré, l’hôtel de Rigny est acquis à la mort de comte de Fels en 1951 par le Canada. C’est actuellement la résidence de son ambassadeur en France. La chancellerie de l’ambassade du Canada est quant à elle située au n° 35 avenue Montaigne.

Sources :
Sorel (Philippe), Guide du promeneur 8e arrondissement, Paris, Parigramme, 1995.
La résidence de l’ambassadeur du Canada à Paris., Vie des arts 10 (1958): 4–9.
Ambassade du Canada en France