L’Hôtel Lambert
Nicolas Lambert, dit Lambert le Riche
Magnifiquement situé vers la pointe Est de l’île Saint-Louis, cet hôtel est commandé en 1639 à l’architecte Louis Le Vau par Jean-Baptiste Lambert, seigneur de Thorigny, conseiller et secrétaire du roi. A sa mort en 1644, son frère Nicolas Lambert de Thorigny (dit « Lambert le Riche), maître des Comptes, hérite de la propriété et fait achever les décors intérieurs par les plus grands artistes de l’époque. S’étant constitué une véritable fortune, il possède pas moins de 14 hôtels particuliers mis en location sur l’ile Saint-Louis !
Le foyer de la communauté polonaise
En 1732, l’hôtel est acquis par le fermier-général Claude Dupin puis par la célèbre marquise du Châtelet, amie de Voltaire, qui le revend en 1745 au fermier-général Martin de La Haye. En 1843, le prince Adam Czartorisky y trouve refuge après l’insurrection polonaise de 1830 contre l’occupant russe. L’hôtel devient le foyer de la communauté polonaise en exil (voir également la Bibliothèque Polonaise). En 1975, le comte Adam Stefan Zamoyski, descendant des Czartorisky par sa mère, est contraint de se séparer de ce joyau familial.
Des fêtes somptueuses au XX siècle
Le baron et la baronne Guy de Rothschild en font l’acquisition et le meublent magnifiquement. Ils y mènent une vie brillante recevant intellectuels, personnalités célèbres et artistes. L’un des étages de l’hôtel est loué à un de leurs amis, le baron de Rédé, qui y donne également des fêtes somptueuses. En 2007, l’hôtel est revendu à l’émir du Qatar pour la somme de 80 millions d’euros. Il a fait l’objet d’une restauration complète pour un coût de 45 millions.
Xavier Niel, collectionneur de belles demeures
En février 2022, on annonce le rachat de l’hôtel Lambert par le tycoon de telecoms Xavier Niel (patron d’Iliad. La transaction s’élèverait à 200 millions d’euros, ce qui fait de cet hôtel particulier le plus cher de Paris. Le milliardaire n’en n’est pas à son premier investissement immobilier dans Paris : il a déjà acquis l’hôtel Rodolphe Kahn (avenue d’Iéna), l’hôtel de Coulanges (place des Vosges), l’hôtel de Miramion (quai de la Tournelle), et plus récemment la maison-atelier Barillet (square de Vergennes). Xavier Niel songerait à faire de l’hôtel Lambert le cadre d’une fondation culturelle. Rêvons qu’il s’ouvre enfin au public !
Un parti architectural original
La grande singularité de l’hôtel Lambert réside dans sa disposition. A Paris, traditionnellement, le corps de logis est situé en fond de cour encadré de deux ailes de communs. Ici, pour profiter de la vue sur la Seine, le logis est placé dans l’aile droite et son jardin suspendu à l’arrière surplombe le fleuve. Le grand escalier placé en fond de cour est traité en loggia ouverte; il est inspiré de la villa Pisani de Palladio.
Des décors en partie détruits par un incendie
Le 9 juillet 2013, l’incendie qui ravage une partie de l’hôtel fait disparaître une merveille : le cabinet des Bains peint entre 1652 et 1655 par Eustache Le Sueur. Le décor peint du plafond représentait une voussure de pierre, ornée de moulurations et de sculptures en bas-reliefs ouvrant sur le ciel. Sur les quatre côtés, animés de bas-reliefs et flanqués de cariatides, on pouvait admirer des scènes mythologiques liées à l’élément aquatique, représentant le triomphe de Neptune, celui d’Amphitrite. D’autres scènes représentaient Diane et les nymphes au bain surprises par le chasseur Actéon, ou Diane se baignant dans une rivière et découvrant la grossesse de Callisto. La mode des cabinets de Bains était alors une nouveauté qui apparaissait chez les particuliers fortunés. La pièce était équipée d’une cuve sur pieds équivalent de notre baignoire. Seules les photographies témoignent aujourd’hui du raffinement de cette pièce.
L’histoire de l’hôtel Lambert est commentée au cours de la visite guidée de l’île Saint-Louis.
Pour l’architecte Louis Le Vau, voir également le château de Vaux-le-Vicomte, le château de Versailles, l’hôpital de la Salpêtrière, le collège des Quatre Nations, le palais du Louvre, l’hôtel Bautru, le Palais des Tuileries, le domaine de Trianon, la chapelle du Palais de l’Institut.
Sources :
Gady (Alexandre), Les Hôtels particuliers de Paris, Paris, Parigramme, 2008
Belles demeures de Paris, Paris, Hachette, 1977.
Guide du patrimoine Paris, sous la direction de Jean-Marie Pérouse de Montclos, Paris, Hachette, 1994.
Adresse : 2 rue Saint-Louis en l’île
Métro : Sully-Morland
Arrondissement : 4e
Téléphone :