L’Arsenal de Paris

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L’Arsenal : le nouveau logis ajouté par Germain Boffrand et accolé à l’ancien logis.

L’Arsenal royal

Situé face à l’île Louviers (comblée en 1847 et rattachée à la rive droite) existait dès le XIVe siècle un dépôt de munitions et d’armes stockées dans deux granges. Les terrains sont situés entre le mur de l’enceinte de Charles V (qui longe la Seine) et le couvent des Célestins. Dès 1512, des canons y sont fondus sous le roi Louis XII mais c’est Henri II qui y crée un véritable arsenal. L’établissement va considérablement s’agrandir sous Charles IX, Henri III mais surtout sous Henri IV qui le fait reconstruire en 1594. L’Arsenal fabrique alors des canons destinés aux frontières, aux places fortes, aux ports et remparts de l’ensemble du royaume de France.

L’Arsenal : la façade de l’ancien logis donnant sur la rue de Sully

Une fonderie de statues

Sous Louis XIII, la fabrication de poudre à canon est déplacée sur la rive gauche, à l’extérieur de la ville, à la Salpêtrière (établissement qui sera transformé en hôpital général en 1656). La vocation militaire de l’Arsenal royal va décliner sous le roi Soleil. S’il sert encore de magasin d’armes, l’activité de fabrication de canons est déplacée dans les places frontalières et les régions mieux dotées en minerai. Célèbres innovateurs dans la fabrication de canons, les frères d’origine suisse Jean-Jacques et Jean-Balthazar Keller vont en partie convertir la fonderie de l’Arsenal royal en fonderie de statues. Ainsi, la plupart de statues des parcs de Versailles et de Marly en sont issues. Nous le verrons plus loin, c’est une vocation essentiellement résidentielle qui va faire la gloire de l’Arsenal.

L’Arsenal : la chambre de la Maréchale de La Meilleraye

Le Grand Maître de l’artillerie

Créée par François 1er, la charge de Grand Maître de l’Artillerie est une fonction importante. En 1599, nommé à cette charge, le duc de Sully s’installe dans le grand logis de l’Arsenal qu’il fait construire à partir de 1602. Son successeur, Charles de La Porte, futur maréchal de La Meilleraye, embellit considérablement le lieu à partir de 1634, notamment les appartements de sa seconde épouse, Marie de Cossé. Il en subsiste deux pièces exceptionnelles (voir plus loin).

L’Arsenal : la chambre de la Maréchale de La Meilleraye

Une chambre de justice

Lieu de résidence et de loisir, l’Arsenal sert également de lieu de justice à partir de 1631 : la « chambre de l’Arsenal » a pour vocation de juger les crimes de fausse monnaie. Deux procès retentissants vont s’y tenir. Le procès de Nicolas Fouquet, Surintendant des Finances accusé de malversations, s’y déroule de 1661 à 1664. Puis, l’affaire des Poisons déclenchera une chambre ardente destinée à châtier les empoisonneurs ; le procès s’y déroule en 1680-1683.

L’Arsenal : l’escalier à balustres de bois

Les travaux commandés par le duc du Maine

Au début du XVIIIe siècle, le duc du Maine (enfant légitimé de Louis XIV et de la marquise de Montespan) est à son tour nommé Grand Maître de l’Artillerie. Entre 1715 et 1725, il fait élever un nouveau logis doublant le logis précédent en épaisseur (sa façade est visible boulevard Morland) par l’architecte Germain Boffrand. Mais seul le gros œuvre est exécuté, la mort de son père l’ayant entraîné dans la gêne financière. C’est un locataire, l’architecte Antoine-Nicolas Dauphin, à qui l’on doit l’exécution à partir de 1741 de six salons de style rocaille, largement méconnus aujourd’hui du public.

L’Arsenal : le cabinet des Femmes fortes

Le marquis de Paulmy, grand bibliophile

En 1757, Antoine-René Voyer d’Argenson, marquis de Paulmy, secrétaire d’Etat à la Guerre, obtient la charge de « bailli de l’artillerie de France », la charge de grand maître étant alors supprimée. Grand collectionneur, Paulmy réunit à l’Arsenal une bibliothèque qui va devenir célèbre. En effet, sa collection de manuscrits médiévaux et d’estampes, enrichie en 1786 par la collection du duc de La Vallière, est l’une des plus belles collections de France. Le bailli de l’artillerie l’ouvre librement aux savants. En 1785, le comte d’Artois, frère du roi Louis XVI, rachète à Paulmy sa bibliothèque.

L’Arsenal : la bibliothèque

La bibliothèque de l’Arsenal

Miraculeusement épargné des destructions et pillages révolutionnaire, la bibliothèque est ouverte au public. La célèbre Madame de Genlis y réside sous l’Empire. Elle y tient de 1802 à 1811 un salon fort couru où elle reçoit écrivains (Chateaubriand, la Harpe, Fontanes) et hommes politiques (Caulaincourt, Talleyrand, Bernadotte). Donnée par le comte d’Artois (futur Charles X) à l’Etat, des bibliothécaires célèbres s’y succèdent. De 1824 à 1844, l’écrivain Charles Nodier y tient un salon littéraire fréquenté par les romantiques.

L’Arsenal : la chambre de la Maréchale de La Meilleraye

L’Arsenal en grande partie démoli

En 1864, l’architecte de la Bibliothèque, Théodore Labrouste, ajoute un pavillon néoclassique à chaque extrémité de la bibliothèque. Pendant la Commune de Paris en 1871, l’Arsenal est partiellement incendié. En suivent des démolitions massives qui réduisent le vaste ensemble de bâtiments existants à un seul édifice resté debout : le long corps de bâtiment compris entre la rue de Sully et le boulevard Morland qui abritait à l’étage les appartements du Grand Maître de l’Artillerie.

L’Arsenal : le cabinet des Femmes fortes

D’éblouissants décors restés intacts

A l’étage, le visiteur découvrira deux pièces (déplacées mais conservées) appartenant aux anciens appartements de la maréchale de La Meilleraye. Magnifique exemple de décor Louis XIII, la chambre de la Maréchale a conservé un magnifique plafond représentant un concert des Muses avec Apollon, attribué à Charles Poerson. A côté, le cabinet des « Femmes fortes » est remarquable par ses représentations de femmes célèbres (reines des amazones, héroïnes de l’Ancien Testament, héroïnes de l’histoire romaine, héroïnes de l’ère chrétienne). Dans la partie Sud ajoutée par Boffrand, les six salons en enfilade aménagés par l’architecte Antoine-Nicolas Dauphin en 1745 et ceux donné à Philibert de Limanton, intendant du comte d’Eu, sont conservés et habillés d’admirables boiseries rocaille dans plusieurs salons, notamment un superbe salon de musique.

L’Arsenal : le salon de musique

Un exceptionnel mobilier intérieur

L’Arsenal reste également remarquable pour son mobilier intérieur. Lorsque le marquis de Paulmy s’y installe à partir de 1756, il décide de conserver l’ameublement choisi par l’architecte Dauphin. Il va également le compléter par des pièces héritées ou commandées aux meilleurs ébénistes. Cet ensemble décoratif cohérent constitué entre 1756 et 1787 a en grande partie traversé le temps sans être dispersé et nous est étonnamment parvenu intact. Parmi les plus belles pièces, citons une exceptionnelle roue à livres (milieu du XVIIe siècle), un cabinet en laque du Japon (vers 1690-1710), un globe terrestre (1766), un régulateur de parquet (vers 1710-1730) attribué à André-Charles Boulle.

L’Arsenal : le salon de musique

La bibliothèque de l’Arsenal aujourd’hui

En 1977, la bibliothèque est devenue un département de la Bibliothèque Nationale de France. Elle possède plus d’un million de documents (dont 150.000 volumes antérieurs à 1880), 15.000 manuscrits, 100.000 estampes, 3.000 cartes et plans.

L’Arsenal : la roue à livres

Horaires d’ouverture de la bibliothèque : la bibliothèque est ouverte du lundi au vendredi de 10h à 18h, et le samedi de 10h à 17h.

Horaires de visite des appartements : tous les mercredis à 15H. Réservation en ligne sur le site de la BnF.

Pour l’architecte Germain Boffrand, voir également voir également l’hôtel de Soubise, l’hôtel Le Brun, l’hôtel de Seignelay, l’hôtel Amelot de Gournay, l’hôtel de Beauharnais, l’hôtel de la Chancellerie d’Orléans, l’hôtel de Villars, les trésors cachés du Petit Luxembourg, l’église Saint-Merri, l’hôpital du Kremlin-Bicêtre.

Sources :
Gallet (Michel), Les architectes parisiens du XVIIIe siècle, 1995, Editions Mengès, Paris.
L’arsenal au fil des siècles, de l’hôtel du grand maître de l’artillerie à la bibliothèque de l’Arsenal, sous la direction d’Olivier Rost et Sophie Guérinot, Le Passage, Bibliothèque Nationale de France, Paris, 2024.
Guide du Patrimoine Paris, sous la direction de Jean-Marie Pérouse de Montclos,1994, Hachette, Paris.

 

Adresse : 1 rue de Sully

Métro : Sully-Morland

Arrondissement : 4e

Téléphone : 01 53 79 39 04