L’hôtel
Benoist de Saint-Paulle
Le faubourg Poissonnière
Dans le dernier quart du XVIIIe siècle, le faubourg Poissonnière devient à la mode et attire les spéculateurs. L’un d’eux, Claude-Martin Goupy, va jouer un rôle capital dans l’urbanisation du quartier. A la fois architecte et entrepreneur, il achète en 1772 des terrains vendus par la communauté des Filles-Dieu. La construction de cet hôtel particulier entre cour et jardin est confiée à Samson-Nicolas Lenoir (1726-1810), dit le Romain, un architecte très actif à Paris à cette époque. L’hôtel prend le nom de Benoist de Saint-Paulle, du nom de son acquéreur, un ancien militaire devenu lui-même spéculateur en biens immobiliers. D’ailleurs Saint-Paulle revend aussitôt l’hôtel au trésorier du Marc d’or Jean-François Caron.
Un hôtel de style néoclassique
L’édifice est un compromis entre un hôtel à la Française et un pavillon à l’italienne. Double en profondeur, il présente un plan massé (centré). L’architecte s’est peut-être s’inspiré du Petit Trianon d’Ange-Jacques Gabriel ou des projets de Claude-Nicolas Ledoux. Côté cour, la façade de style néoclassique, appareillée à refends, est d’une grande sobriété. Elle est animée par un portique à quatre colonnes ioniques. On accède à l’hôtel par un perron de plusieurs marches. Les grandes baies cintrées du rez-de-chaussée sont surmontées d’élégantes guirlandes de fleurs. La façade côté jardin s’organise de la même façon, animée par des pilastres au lieu de colonnes. La surélévation pratiquée postérieurement a malheureusement alourdi l’édifice. Ajoutées en 1778, les longues ailes qui encadrent la cour sont légèrement postérieures : réalisées par l’architecte Antoine-François Peyre (1739-1823), elles abritent des appartements habillés de lambris.
Marie-Louise O’ Murphy, maîtresse de Louis XV
En 1779, l’hôtel est acquis par François-Nicolas Lenormand, maître d’hôtel du comte d’Artois. Sa seconde épouse, Marie-Louise O’ Murphy (1737-1814), est restée célèbre. D’origine irlandaise, la jeune fille est d’abord éduquée au célèbre Parc-aux-cerfs, vivier de jeunes créatures pour le roi Louis XV. En 1752, à 14 ans, elle devient la maîtresse du roi et lui donne une fille deux ans plus tard. Présentée au peintre François Boucher, elle devient son modèle. Le tableau de Boucher intitulée « Melle O’ Murphy » y présente la paire de fesses sans doute la plus célèbre du XVIIIe siècle français. Le tableau est visible aujourd’hui à la Pinacothèque de Munich.
La bourgeoisie remplace l’aristocratie
En 1795, l’hôtel est acheté par l’orfèvre Louis Chéret. Il est loué au maréchal Ney sous l’Empire. En 1802, le Maréchal, surnommé « le brave des braves », y célèbre son mariage. Puis la demeure est acquise en 1820 par un banquier, Aimé Akermann. En 1856, un autre banquier et homme politique très puissant, César-Ernest André (1803-1864), en fait l’acquisition. Son fils Edouard André fera construire plus tard une somptueuse demeure, l’hôtel Jacquemart-André. Ensuite, Jules et Léon Fould, des négociants issus d’une grande dynastie de banquiers, y installent leurs bureaux. Donnant sur la rue d’Hauteville, le jardin situé à l’arrière est morcelé. L’hôtel de Saint-Paulle est aujourd’hui divisé en appartements et fermé par un digicode.
Pour l’architecte Claude-Martin Goupy, voir également l’hôtel Cardon, l’hôtel Deleuze, la place du Palais-Bourbon.
Pour l’architecte Samson-Nicolas Lenoir dit le Romain, voir également le marché d’Aligre, l’abbaye Saint-Antoine, l’hôtel de Sechtré, le château des Ternes, le théâtre de la porte Saint-Martin, l’immeuble de rapport boulevard du Temple, immeuble de rapport place de la Bourse.
Sources :
Duclert (Ariane), Guide du promeneur 10e arrondissement, Paris, Parigramme, 1997.
Guide du Patrimoine Paris, sous la direction de Jean-Marie Pérouse de Montclos, Paris, Hachette, 1994.
Adresse : 30 rue du faubourg Poissonnière
Métro : Bonne Nouvelle
Arrondissement : 10e
Téléphone :